« Confiance et Leadership »

Ali ArmandLe titre reprend les mots clés de 2 précédents livres que j’avais appréciés : « Speed of Trust » de Stephen MR Covey et « Leadership sous 0 degré » de Dennis NT Perkins. Pourtant la bibliographie de 10 pages d’Ali ARMAND ne cite aucun de ces 2 ouvrages, probablement parce que les auteurs ont eux –mêmes de nombreuses références et que notre docteur en sociologie a préféré s’inspirer directement des premières sources.

L’ouvrage livre de nombreuses références et le résumer réduirait nécessairement les apports qu’y trouverait chaque lecteur. Voici simplement quelques passages choisis qui font écho soit à mes sujets de travail actuels, soit à l’idéal d’un management en entreprise.

Tenir compte de son environnement est primordial. Ali Armand rappelle l’acronyme VUCA apparu dans les années 1990 et reprend les propos de B Johansen pour contrer ce modèle :

VUCA « Counter VUCA »
Volatility : environnement dynamique, changements rapides, … Vision : construire le cap pour neutraliser la volatilité
Uncertainty : aversion naturelle à l’incertitude Understanding : dans ma précédente mission, on demandait aux équipes terrains de se plier au TOP = Temps d’Observation Préalable pour bien comprendre la situation et agir en sécurité. Ici aussi, les managers sont invités à des temps d’arrêt, d’écoute et d’observation de leur environnement.
Complexity : interdépendances, influences, … rendent complexe la compréhension de notre environnement Clarity : réduire la complexité et s’adapter à la situation.
Ambiguity : interprétations multiples à défaut d’avoir l’ensemble des informations permettant de lever les doutes Agility : adaptation récurrente aux évolutions de l’environnement

 

Ali Armand illustre de nombreuses notions par des citations de salariés d’entreprises avec lesquelles il a travaillé. Cela donne ainsi du relief et dépasse le cadre théorique de son exposé. J’aime ça. Parfois, la culture de l’entreprise transpire dans les propos du salarié et parfois, on perçoit les rêves (ou frustrations) des personnes interrogées.

A cette diversité d’expériences, Ali n’oublie pas les nombreuses références, ainsi il nous décrit les différents profils de leaders :

  • Le leadership héroïque (faire face aux crises)
  • Le leadership transformant (union autour d’un objectif supérieur)
  • Le leadership transactionnel (objectifs différents entre leader et followers)
  • Le leadership transformationnel (élévation du niveau de conscience des valeurs communes)
  • Le leadership moral (aspiration éthique)
  • Le Leadership charismatique (emprise du leader sur ses followers)
  • Le leadership idéalisé (le leader reconnaît chacun, le respecte et l’accompagne)
  • Le leadership basé sur les valeurs (intégrité, responsabilité, mansuétude, …)
  • Le leadership visionnaire (le leader construit sa vision avec ses collaborateurs, fournisseurs, clients et l’ensemble de ses parties prenantes.)
  • Le leadership exemplaire (définir le chemin, inspirer une vision partagée, challenger le processus, faciliter l’action, encourager)

Après avoir comparé les différents styles de pouvoir et de leadership, l’auteur propose une définition de la confiance :

« La confiance est un facilitateur des relations sociales et des transactions économiques. Il s’agit d’un sentiment de sécurité qui permet l’engagement dans les actions communes, fondé sur la visibilité et la lisibilité des choses et des situations. C’est un pari sur la pertinence et l’adéquation des propositions ou des prestations. C’est un pari sur la fiabilité de l’autre, sur sa bonne foi, sur la conformité de ses comportements aux attentes explicites ou implicites que l’on pourrait formuler. »

A partir de différents travaux de sociologie, le lecteur découvre ce qui fonde le processus de production de la confiance et ce qui la fait évoluer ; de la confiance a priori à la confiance consolidée (ou méfiance voire défiance…). Il rappelle qu’en anglais, confiance se traduit avec deux mots : « Trust » et « Confidence ».

Comme une synthèse des parties précédentes, Ali propose un style de leadership agile pour développer la confiance. Bien que convaincu par les axes développés et bien que les propositions restent méta contrairement à « Speed of Trust » de Stephen MR Covey (actions et comportements), un point retient mon attention sur l’adaptation de son style de pouvoir. En effet, Ali invite les leaders à réduire l’assertivité pour augmenter la réceptivité des parties prenantes :

« dans les relations avec autrui, on préconise généralement le style « assertif ». Or l’assertivité vise à affirmer votre point de vue et vos intérêts. Pour être attentif aux parties prenantes, il convient de dépasser le niveau de l’assertivité pour développer un style de pouvoir « réceptif ». »

Qu’il soit entendu ! Dans le même esprit, l’humilité fait partie des axes du modèle de leadership proposé.

Il insiste sur ce point car selon lui, c’est essentiel pour construire la vision du leader. Vision qui doit être co-construite avec les parties prenantes internes et externes. Il liste une série de questions dont certaines inspirées de Blue Ocean Strategy en ajoutant à la dimension clients la dimension collaborateurs. La vision est le premier des 6 axes du « Trust Leadership Profile » qu’il propose. Je vous laisse découvrir les 5 autres dans son livre.

Enfin, Ali Armand finit en proposant deux quotients :

  • Le quotient de la confiance organisationnelle (QCO)
  • Le quotient de la confiance interindividuelle (QCI)

Ces quotients peuvent être calculés et l’auteur propose même un fil conducteur de formation pour mettre en pratique les convictions exposées.

Je vous souhaite une excellente lecture et surtout une belle expérience ensuite !

Leadership sous 0 degré

A l’époque, les aventures se vivaient encore dans le monde réel, plus souvent qu’aujourd’hui. Notre planète faisait l’objet d’explorations et de découvertes. Vous pourriez me citer un contre exemple récent avec le record réalisé par James Cameron, plongeant dans les abysses de l’océan Pacifique, par 10km de fond.

« Leadership sous 0° » revient sur l’aventure de Sir Ernest Shackleton et son expédition en Antarctique de 1914 à 1916. Dennis N.T. Perkins tire des leçons de management de cette expérience.
L’auteur en propose 10 :
1. Tenir le cap vers le but ultime et objectifs à court terme. N’est-ce pas l’un des fondements de la stratégie : vision et victoires rapides ?
2. Donner l’exemple. L’auteur souligne le fait que pour obtenir des équipes une forte implication, il faut savoir se donner soi même et contribuer à l’effort.
3. Rester optimiste et montrer de l’assurance tout en demeurant réaliste.
4. Prendre soin de soi. Il s’agit de trouver le bon équilibre entre les 2 enseignements précédents et de se sentir bien dans avec les décisions prises (ou non).
5. Souder. Equipe, équipe, équipe. Un leader n’existe pas sans équipe.
6. Minimiser les différences de statut social : courtoisie et respect.
7. Maîtriser les conflits.
8. Célébrer les victoires.
9. Prêt à prendre le Grand Risque : saisir la dernière chance.
10. N’abandonner jamais !

Les extraits de l’expédition donne envie de lire le récit original de l’Endurance. En lisant, je me suis fait la réflexion que l’histoire se porterait bien à l’écran et que cela donnerait un sacré film d’aventure, un blockbuster bourré d’effets spéciaux, etc (James Cameron adorerait, non ?). Après une recherche web, d’autres ont déjà eu l’idée, aussi bien en long métrage qu’en série TV. A l’occasion, il faudra que je regarde si on ressent le leadership du capitaine dans les interprétations.

Revenons à l’analyse de Perkins. Dans ma frénésie de corner les pages, je m’aperçois que peu d’exemples contemporains ont retenu mon attention. Pour plusieurs raisons et en particulier, parce que l’analogie de la vie en entreprise avec l’aventure de Shackleton présente des écarts importants :
Piloter un projet diffère de la gestion d’un processus mature. Or, même si toute entreprise a des projets, il lui faut surtout une activité récurrente pour assurer ses charges a minima et distribuer des primes et dividendes le cas échéant.
Vivre 24/7 une expédition n’a rien à voir avec une vie professionnelle classique. De nos jours, il est souvent de bon ton de séparer la sphère privée et la sphère professionnelle. Quand vous êtes coincés à plusieurs sur un navire puis sur les glaces, vous partagez plus, vous écoutez plus.

Il y a donc quelque chose de frustrant. C’est comme lire un livre de recettes sans pouvoir en goûter une seule.

Cependant, les aventuriers, celles et ceux prêts à démarrer des projets et à souffrir pour atteindre un but ou un rêve, apprécieront le récit de Perkins.
L’auteur décrit avec humour des situations qu’on rencontre aussi dans de grandes entreprises : ‘il n’y a probablement pas tache plus difficile pour un leader que celle d’avoir affaire à des gens médiocres tout en demeurant sensible aux sentiments de chacun et en veillant à préserver l’unité de l’équipe.’ Et il ne s’agit pas uniquement de l’équipe mais bien de tous les acteurs autour du leader : hiérarchies, homologues, subalternes, …

La situation extrême permet de mettre en évidence l’importance des fondamentaux y compris les plus basiques comme la politesse. Perkins l’illustre avec une anecdote personnelle saisissante : au Viet Nam, alors qu’il portait un message en pleine bataille, sous le feu ennemi, Perkins interrompit la discussion entre son commandant et l’officier du renseignement. Ce dernier lui cria : ‘Excuse toi !’ Perkins avait trouvé la situation irréaliste puis avait compris que ‘la politesse constituait un des rares vestiges de la civilisation.’

Le livre regorge d’anecdotes illustrant les enseignements de l’aventure de Sir Shackleton. Il dessine les traits communs des leaders et rappelle qu’une entreprise produit grâce à l’implication coordonnée des Hommes qui la constituent. Encore faut-il construire son équipe et déceler sa motivation ?

Allez en route et bonne lecture !

Management et leadership dans les séries TV

En regardant certaines séries TV, je me suis souvent demandé si les héros étaient des managers, voire des leaders. Evidemment dans Desesperate Housewifes, on serait plus dans le registre charisme personnelle (ou pas) et popularité dans le quartier et la vie sociale. Il faut donc regarder les séries mettant en scène la vie professionnelle pour trouver des exemples (à suivre ou non). Or, les métiers qui attirent la TV sont limités, je vais donc me limiter à deux domaines : médecine et criminologie. Je croiserai mon regard entre les citations de Warren Bennis (“On becoming a leader”) que j’ai appréciées dans un excellent cours sur le leadership et quelques observations des séries :  Grey’s Anatomy, Dr House, Esprit Criminel (Criminal Minds) et NCIS.

“Managers administer, leaders innovate” (WB)

Que dire de Richard Webber, directeur du service chirurgie au Seattle Grace dans Grey’s Anatomy ? Il dégage une autorité naturelle par son âge et sa compétence de chirurgien. En médecine, il me semble que la spécialisation et la compétence sont les atouts nécessaires à grimper les échelons hiérarchiques. Est-ce pour autant suffisant à transformer un bon médecin en un excellent manager ? pas simple. Richard organise son service avec une approche directive et le talent d’un manager mais pas nécessairement d’un leader…

“Managers copy, leaders show originality” (WB)

Passons de la chirurgie au diagnostic… bon ok, normalement, c’est plutôt l’inverse mais c’est un autre chef de service : Gregory House. Le misanthrope docteur est clairement dans le management participatif et laisse la parole à son équipe pour construire un diagnostic partagé. Bien évidemment, il ira souvent à contre courant des idées reçues de ses confrères mais avec un objectif fixe : trouver la solution. Le plus bel atout de Dr House, c’est l’écoute qu’il porte à son équipe et à ses patients même si parfois les apparences laissent croire le contraire.

 “Managers rely on control, leaders inspire trust” (WB)

Changeons de métier et revenons à un pilotage plus directif, celui de Leroy Jethro Gibbs, chef de l’équipe NCIS. L’agent spécial donne l’exemple du management à l’affectif : petite tape affectueuse au flambeur Dinozzo, toujours une boisson caféinée pour Abby et autres attentions pour ses collaborateurs. Et ce n’est pas du one shot ! Au fil des épisodes, il réitère ses gestes et inspire à ses collègues confiance et admiration.

“Managers focus on systems, leaders focus on people” (WB)

Aaron Hotchner dirige le département de sciences du comportement du FBI dans Esprit Criminel et on retrouve une approche participative façon Dr House. Chacun contribue à dresser le profil du criminel, jamais un heurt ! Chacun écoute l’autre et complète l’analyse. Hotch veille sur son équipe en leur accordant tout sa confiance même quand Spencer Reid se drogue pour surmonter ses propres angoisses ou que des trahisons se profilent au niveau de sa hiérarchie.

Finalement dans chacune de ces séries, les chefs ont en commun plusieurs qualités :  

  • Ils font confiance à leurs équipes (et elles lui rendent),
  • Ils s’impliquent dans les missions tant comme leader que comme acteur au même niveau que leurs équipes,
  • Ils partagent leurs visions.

 

Pour celles et ceux qui aimeraient savoir si les leaders sont des superhéros, rendez-vous sur la chaîne YouTube de L’ESCP Europe et cette vidéo de Katharina Balazs.