Pour une raison que j’ignore, on m’a prêté ce livre. Sans doute, est-ce le résultat d’une discussion sur l’actualité lors de la pause déjeuner. Merci pour cette lecture intriguante.
Je n’ai pas corné les pages pendant mes commutations pour rendre le livre en état mais j’ai pris en note quelques citations. Certaines pourraient être entendues dans le monde de l’entreprise pour les fanas de la concurrence en océan rouge.
« Un vrai soldat s’adapte aux stratégies de son ennemi. » (entretien de l’auteur avec Abou Youssef en Somalie)
D’autres n’auraient pas le même sens si elles n’émanaient pas de terroristes.
« Intégrer une cellule clandestine demande 4 qualités. La motivation, la fiabilité, la discipline et l’intelligence. » [remplacer cellule clandestine par organisation politique, association, entreprise, …]
La démarche de l’auteur demeure pour moi un mystère. Si je peux comprendre son besoin de se mettre en danger ponctuellement, ce livre pourrait lui faire courir un danger perpétuel. Quel intérêt quand son discours peut ne pas convaincre ses lecteurs ou sa cible ? Qui est-elle d’ailleurs ? Les politiques ? La DGSE/I ? Al-Quaida ?
Tout au long du livre, il se dit neutre et sans jugement. Pourtant… Mais, au final, que faut-il retenir ? La peur ? Se convertir ? Virer les gens de la sécurité intérieure ?
« Ils délaissent le monde réel et se réfugient derrière leurs super ordinateurs. » (cette phrase aussi, on peut la prêter à d’autres, des auditeurs ?)
« La technologie rend nos espions paresseux, elle leur fait perdre de vue l’essentiel : le courage et l’efficacité. »
Jugement de l’auteur sur son pays ?
« Pendant que la France se bat au Mali, eux sapent les fondations du pays sans être inquiétés. De l’intérieur. »
L’auteur livre un diagnostic qu’on doit croire sur parole puisqu’aucune photo n’illustre ses découvertes. Et si c’était la sécurité intérieure qui l’avait promené pour lui faire peur ? Pour le convaincre d’arrêter de se prendre pour un super espion ? Après tout, pourquoi devrais-je avoir plus peur de mon entourage en pensant qu’il y a peut-être des terroristes alors qu’il y a peut-être aussi des espions ? Une chose est sure, je suis entouré d’héros du quotidien.
Une autre déception est que Samuel Laurent n’explique pas comment sont embrigadés tous ces futurs martyres. Comment arrive-t-on à penser ainsi :
« Si les infidèles tentent de leur barrer la route, nous frapperons si fort qu’ils en resteront pétrifiés. »
« Nous faisons la guerre à ceux qui veulent empêcher l’avènement de ce monde parfait. »
Persuader quelqu’un d’offrir sa vie pourrait être utile à de bonnes causes. Aucune piste réelle sur ce point. Qu’est-ce qui peut faire que quelqu’un parte en Syrie en abandonnant tout (même s’il y a peu à abandonner) et revienne avec une autre vie, falsifiée, dans l’attente d’une mort pour une cause peu partagée ? L’auteur nous livre un rapport de chefs. Il a rencontré ceux qui ne mourront pas parce qu’ils pilotent les agents dormants. On comprend qu’ils mobilisent agent par agent mais pas nécessairement des foules… Aimer un dieu au mépris de sa vie, pourquoi pas mais au mépris de celles des autres…
J’ai même parfois eu l’impression que l’auteur admirait le talent des émirs rencontrés.
« Sa grande vivacité intellectuelle et son esprit brillant me paraissent difficilement conciliables avec la foi inébranlable et impossible à questionner qui l’anime. » (entretiens avec Anjem Choudary, imam à Londres)
Facile à lire, le récit est intéressant mais finalement ne présente pas la force d’une fiction, ni celle d’une solution à un problème… Pas de prix Nobel de la paix.